Dans chacun de ses numéros, Monsieur en Bourgogne donne carte blanche à Alain Hugard pour aller à la rencontre des personnalités qui font l’histoire de l’automobile de notre région. Grâce à son entregent, le président délégué de l’Automobile Club de Bourgogne est capable de nous ouvrir de très belles portes. Comme ici celle, très secrète, du bureau d’Yves Morizot, le fondateur de Stand 21.
Stand 21, un nom qui résonne aux oreilles de tous les amoureux de sport automobile. Une entreprise mondialement connue, dont le siège social est situé à Talant. Lorsque nous préparons le numéro que vous avez entre les mains, l’entreprise fête ses 50 ans. Difficile pour nous de passer à côté. Mais Yves Morizot a la réputation de ne pas être facile d’approche. Alain Hugard nous rassure : « Yves est un ami. Il était avec mon frère à l’école. Allez, je l’appelle ». Forcément, c’est plus facile… Quelques jours plus tard, rendez-vous est donc pris directement dans les locaux de l’entreprise. Accueil souriant du maître des lieux. Et festif de la part de son jeune compagnon à quatre pattes. Nous entrons dans son vaste bureau. Qui pourrait presque faire office de musée des Casques et des Combinaisons ! Des originaux ayant appartenu à des champions plus mythiques les uns que les autres dont ceux d’Alain Prost et d’Ayrton Senna… Excusez du peu. À vrai dire, on ne sait plus où poser ses yeux. « Ce sont eux, les pilotes, qui ont été nos plus grands ambassadeurs. Nous sommes arrivées en formule 1 en 1975 grâce à Jacques Laffite. Trois ans plus tard, nous équipions toute la grille. » La légende Stand 21 était née. Pourtant tout ne fut pas, au départ, si facile pour Yves Morizot. Alain Hugard se souvient « d’un gars solide avec de l’ambition et très courageux ». « C’est en 1962 que j’ai commencé dans la boulangerie Panidor de mon père, raconte Yves Morizot. Mais ce n’était pas vraiment une passion et j’ai alors eu l’opportunité de racheter le magasin MM Racing. Sauf que je n’avais pas une tune… Jean- Claude Masson me prêtera 27 000 francs, que j’ai remboursés en 27 mensualités. Au début j’allais même faire les vitres des commerçants des rues Jean-Jacques Rousseau et Vannerie pour joindre les deux bouts. » À l’origine, Stand 21 se fait connaître localement par son activité de vente de motos, d’accessoires et même de vélos. À l’angle de l’avenue Foch, où se trouve actuellement une brasserie. Une autre époque. Celle du choc que connut Yves Morizot et que raconte Alain Hugard : « En 1970, sur le circuit de la BA 102 de Longvic où se déroulaient alors des courses, Jean-Pierre Cassegrain a un accident en formule 3. Sa voiture prend feu, les dégâts sont considérables. Il perd un côté de son visage ainsi que l’usage de ses mains. Sa carrière s’arrête alors qu’il était promis à un passage en formule 1 l’année suivante. Yves Morizot sera de ceux qui aideront le malheureux pilote à s’extraire de la voiture ».
1970, un accident, le déclic
L’événement qui va créer un déclic chez Yves Morizot. « On ne pouvait pas laisser ces gars, dont beaucoup étaient mes amis, être si mal protégés. Il va y avoir, au début des années 70, une lente prise de conscience et nous avons été les premiers à créer les premières combinaisons double épaisseur. » On connaît la suite. Stand 21 va devenir une référence incontournable en matière de sécurité et l’équipementier incontournable du monde magique mais si fermé du sport automobile mondial. Une réussite symbolisée par la photo culte, prise le 21 septembre 1986 sur le circuit d’Estoril réunissant les quatre pilotes encore en lice cette année-là pour le championnat du monde : Alain Prost, Ayrton Senna, Nelson Piquet et Nigel Mansell. Tous en combinaison Stand 21, vous l’aurez compris.
Mais dans le monde impitoyable de la formule 1 où l’argent est roi, des concurrents pas toujours vertueux, notamment italiens, vont faire les yeux doux aux pilotes. « Ils se sont mis à les payer pour qu’ils portent leurs combinaisons… Ils les ont utilisées pour se faire une image et faire connaître leur gamme généraliste. C’était totalement contraire à ma philosophie. Chez Stand 21, on fait dans la haute couture au service de la sécurité et du confort des pilotes. Moi je ne fais pas de la compétition pour espérer, au final, faire la promotion du bas-de-gamme. » Pas de langue de bois avec Yves Morizot… « Je vous avais prévenus », s’amuse Alain Hugard. Le président délégué de l’Automobile Club nous rappelle que c’est notre hôte du jour qui a fait passer le golf de Norges-la-Ville de 9 à 18 trous, à l’époque où il en était copropriétaire avec Alain Prost et Jacques Laffite. Les journées devaient être bien remplies. Désormais, c’est accompagné de son fils Romain qu’il pilote l’entreprise au quotidien. À Talant, une cinquantaine d’ingénieurs, de couturières et de commerciaux s’activent pour répondre aux demandes du monde entier. « Les casques et les combinaisons sont produits en intégralité ici tandis que les accessoires (gants, chaussures, sacs…) sont fabriqués depuis 2003 dans notre usine en Inde. » Stand 21 est plus que jamais une référence sur un marché qui, en 1970, ne comptait que quelques milliers de pilotes automobiles dans le monde. Aujourd’hui, on atteint presque 1,5 million de pratiquants dont 99 % sont des « gentlemen drivers ». L’entreprise, qui peut se vanter de détenir l’exclusivité du marché de Porsche Monde, est aussi le premier fabricant mondial de Hans. Un accessoire devenu indispensable, et le plus souvent obligatoire, pour la sécurité des pilotes. « C’est la plus grande innovation en matière de sécurité depuis le casque intégral et la combinaison anti-feu. Il réduit de 80 % le risque de fracture aux cervicales ou d’élongation des muscles lors d’une décélération brutale, première cause de décès en sport automobile. »
La sécurité est décidément la valeur première de la maison, comme le démontre la fondation Stand 21 Racing Goes Safer. « Une organisation à but non lucratif qui collabore avec les milieux médicaux et scientifiques aussi bien qu’avec des organisations de premier ordre dont la FIA [ndlr : Fédération internationale de l’automobile] pour pointer les problèmes de sécurité et apporter des solutions aux acteurs des sports mécaniques. »
> Les États-Unis, l’autre pays d’Yves Morizot
85 % de la production de Stand 21 est exportée. Notamment aux États-Unis, la deuxième patrie d’Yves Morizot. « Ce marché est incroyable. Et il y a tellement de belles compétitions avec des pilotes de tous horizons, de tous âges. Des pros et des gentlemen drivers qui veulent l’excellence. Ils savent se faire plaisir. » Son amour du pays l’amène à y vivre la moitié de l’année « Là-bas, pas la peine de s’excuser de faire du business. Vous savez, contrairement au cliché souvent véhiculé, c’est bien moins un pays de castes que la France. Quand je vais faire des sorties moto avec mes potes là-bas, personne ne se pose la question de qui est qui, qui fait quoi, qui a de l’argent ou non. J’ai créé des amitiés très fortes aux États-Unis. »
stand21.com