En cas de difficultés, le traitement des cotisations sociales du dirigeant est différent selon le statut social de celui-ci. Attention si vous êtes à la tête d’une SARL en particulier : les dettes de cotisations sociales sont alors… les vôtres !
Le traitement des cotisations sociales du « dirigeant en difficulté » est différent selon son statut social. Le dirigeant est soit assimilé à un salarié, soit soumis au régime des indépendants, c’est-à-dire au régime des travailleurs non-salariés. (TNS). Ainsi, certaines catégories de mandataires sociaux sont soumises au régime des salariés, et donc échappent au statut des travailleurs non-salariés. Le président d’une SAS (société par actions simplifiées) est ainsi assimilé à un salarié. Le président du conseil d’administration et les directeurs généraux des sociétés anonymes sont également assimilés à des salariés. En revanche, le travailleur indépendant, c’est-à-dire le professionnel libéral, l’artisan, le commerçant ou l’agriculteur, est, quant à lui, redevable des cotisations et contributions du régime des travailleurs non-salariés, quelles que soient les modalités selon lesquelles il exerce son activité. Il en est de même du gérant de SARL (société commerciale à responsabilité limitée).
Que se passe-t-il en cas de difficulté de la société ?
Les dettes de cotisations sociales du président d’une SAS en difficulté (qui est donc assimilé à un salarié) sont exclusivement des dettes de la société… contrairement aux dettes de cotisations sociales d’un gérant majoritaire de SARL, qui sont des dettes personnelles du gérant (cotisations sociales personnelles). Dans le cadre de la situation sanitaire, des plans d’apurement de cotisations sociales pour les travailleurs non-salariés ont été autorisés, mais qu’en est-il si le cotisant ne se voit pas offrir des modalités d’apurement compatibles avec sa situation de trésorerie ? Que peut-il faire pour se protéger ? Peut-il bénéficier d’une procédure collective ? L’entrepreneur individuel, comme l’auto-entrepreneur, peut bénéficier d’une procédure collective (redressement judiciaire par exemple) puisqu’il exerce une activité professionnelle indépendante. Les sociétés commerciales peuvent également bénéficier d’une procédure collective, mais se pose alors la question de l’intégration dans le passif de la procédure des dettes de cotisations sociales du dirigeant.
On revient alors sur la distinction SARL/SAS. Les organismes sociaux considèrent que les cotisations sociales du gérant sont des cotisations personnelles et refusent de les intégrer au passif des sociétés placées en redressement judiciaire. Ainsi, si la société est en bonis, le dirigeant TNS va généralement (après un vote de ses associés) faire supporter ses cotisations par la société mais, si la société est en difficulté, les cotisations sociales vont retomber sur sa tête. Les organismes sociaux poursuivront donc le recouvrement forcé des cotisations sociales auprès des gérants. Il faut prendre conscience que les dirigeants des TPE (principalement constituées sous forme de SARL) restent donc tenus personnellement de ce type de dette alors que le dirigeant assimilé salarié d’une société commerciale (président ou directeur général de SAS) sera, en revanche, protégé par l’ouverture d’une procédure de sa société et ne sera donc pas poursuivi personnellement sur son patrimoine personnel.
Cette différence de traitement n’est pas justifiée
Selon la forme juridique de la société, le dirigeant est plus ou moins exposé personnellement pour le recouvrement des cotisations sociales
qui découlent, à chaque fois pourtant, de l’exercice de son mandat de dirigeant ! Ce même dirigeant TNS ne peut, bien évidemment, pas bénéficier et donc être protégé par l’ouverture d’une procédure collective « personnelle » puisque le dirigeant travailleur non salarié… n’exerce aucune activité professionnelle indépendante. Alors même que les cotisations TNS qui naissent au cours de l’activité professionnelle ont été ainsi qualifiées juridiquement de dettes professionnelles (avis de la Cour de cassation du 8 juillet 2016 numéro 16-70.005). Seule la procédure de surendettement est ainsi ouverte au gérant de SARL, avec des conséquences dramatiques sur sa situation, mais seulement et seulement s’il peut justifier aussi de l’existence de dettes personnelles autres que « ses » cotisations sociales. À défaut, son dossier de surendettement sera rejeté
Situation ubuesque
La situation est donc ubuesque. Pour se protéger des cotisations sociales personnelles, le gérant TNS doit donc se soumettre à deux procédures : une procédure collective pour sa société et une procédure de surendettement pour lui-même ! Pour favoriser le rebond de l’entrepreneur, quel que soit son statut, il est indispensable de prévoir expressément que les dettes professionnelles de cotisations sociales
du mandataire social constituent une dette exclusive de la société et non du dirigeant social. Il est indispensable d’aligner le régime de protection du dirigeant au regard de ses cotisations sociales, quel que soit son statut, puisqu’elles découlent d’un mandat social. Espérons que les textes en préparation puissent protéger les dirigeants TNS (soumis au régime des indépendants), comme le sont les dirigeants assimilés salariés.

Par Éric Seutet
Seutet & Avocats
Avocat à la cour d’appel de Dijon
Membre du réseau Gesica
Pôle Profession Libérales CPME 21
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